Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Correspondance, tome II.djvu/263

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maison aura ce nom : Liberté ; elle s’appellera Liberty-Home. C’est l’usage anglais de baptiser les maisons. Nous vivons, ma famille et moi, vous le savez peut-être, dans une simplicité absolue, et, sous ce rapport, Guernesey peut donner la main à Nohant. Pensez-y donc, vous avez presque un an devant vous, et venez-nous. Si vous saviez comme je vous fais cette offre du fond du cœur ! Vous vous promènerez dans mon jardin, très petit ; n’allez pas rêver vos grandes larges plaines. Il y a ici tant de mer et tant de ciel que c’est à peine si l’on y a besoin d’un peu de terre.

Ma femme vous a déjà fait cette invitation ; vous avez répondu la moitié de oui ; répondez-moi à moi l’autre moitié. Cela nous fera une joie sur laquelle nous vivrons en vous attendant. Vous ferez ici quelque livre magnifique, et vous le daterez de Guernesey ; ce pauvre vieux écueil, prenez-le en gré et faites-lui cette fortune. J’y ai mis une date d’épreuve ; mettez-y une date de gloire.

Je suis content d’une chose, c’est que ce livre, Dieu (aux trois quarts fait), répond d’avance à votre pensée. Il semble que vous l’ayez connu en écrivant cette lettre de Louise qui est la conclusion de vos admirables articles. La fin lumineuse, voilà ce que je veux, voilà ce que vous voulez ; et ce brave Théodore (j’en connais plus d’un) sera lui-même content.

Vous êtes un esprit ; aussi je vous dis familièrement : merci. Et vous êtes une femme, ce qui me donne le droit de me mettre à genoux devant vous et de baiser respectueusement votre main.

Victor Hugo.

Les journaux de ma petite île reproduisent vos articles avec enthousiasme[1]


À Madame Adolphe Adam[2].


Hauteville-House, 25 juillet [1856].

Je n’ai aucun portrait de moi à encadrer chez aucun marchand de Paris ; mais puisque, dans votre charmante bonne grâce, vous voulez que je mette ma tête à vos pieds, la voici : si j’ai tant tardé à vous répondre, c’est que je trouvais cette image de moi-même un peu sombre et farouche et que j’eusse voulu vous en offrir une autre. À qui offrira-t-on un rayon si ce n’est à l’étoile, et à qui offrira-t-on un sourire si ce n’est à vous ? Malheureusement mon petit atelier photographique tarde à s’installer, et je me

  1. Archives de Mme  Lauth-Sand.
  2. Femme du compositeur Adam.