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À Charles et à François-Victor.


H.-H., dimanche 20 octobre.

Mon Victor, d’abord, je coupe ceci pour toi, et je commence par ce qui t’intéresse[1], puis je passe à toi. Ceci est coupé dans un article de M. Jouvin, et tu vois que j’avais raison dans ce que je disais l’autre jour à notre excellent ami M. Ulbach.

Donc je n’ai pas eu tort de lui envoyer la préface de Paris-Guide. Enfin, voici en quel français mon arrivée ici est annoncée dans la Gazette :

L’illustre poète retourna à Guernesey (hier) mardi.

Le petit sac aux journaux vidé, j’arrive aux affaires. J’avais, en partant, prié M. Van Vambeke de déposer chez M. Lambert mes titres de rente italienne, de prendre un reçu de ce dépôt, et de m’envoyer directement ce reçu à Guernesey par lettre chargée. Or aujourd’hui 20, je n’ai encore rien de M. Van Vambeke, quoique l’achat ait dû être fait le 7 octobre. Vois, je te prie, M. Van Vambeke, dis-lui que j’attends toujours le reçu de mes titres déposés chez le correspondant de Rothschild à Bruxelles, et presse-le de me l’envoyer le plus tôt possible.

J’ai trouvé ici, m’attendant, d’innombrables lettres de tous les pays, surtout des pays opprimés, et plusieurs du plus haut intérêt. Elles vous passionneraient tous, que n’êtes-vous là ! — Le pauvre et brave Labrousse est donc mort ! À mon tour je regrette de n’avoir pas été à Bruxelles. Je lui eusse dit dans sa tombe l’adieu de l’exil.

J’ai eu affaire ici à une certaine anarchie, mais j’ai déjà rétabli l’ordre. Tout marche à peu près. Un détail, il est venu cet été près de mille visiteurs étrangers à Hauteville-House. J’ai eu à feuilleter en arrivant un registre chargé de noms et d’inscriptions. Les colonels anglais et les révérends américains abondent.

M. Kesler n’a toujours pas reçu son draft de Mme  Montgomery Atwood. Dis à M. Lacroix qu’il fait l’article pour Paris-Guide dans le Daily News.

Toutes les santés sont bonnes ici. J’espère que les beaux yeux de ta chère mère sont vifs et joyeux. Je vous serre dans mes bras tous, les grands et le petit.

Mets à cette lettre minuscule un timbre de 10 centimes, et jette-la à la poste[2].

  1. « Le tome III des Apocryphes de Shakespeare vient de paraître chez Pagnerre. C’est le tome XVIII et dernier de la célèbre traduction de M. F. Victor Hugo. Ainsi se trouve complétée cette œuvre considérable qui permettra enfin de comprendre le grand tragique anglais. » (Extrait d’un journal collé sur la lettre.)
  2. Publiée en partie dans Actes et Paroles. Pendant l’exil. Historique. Édition de l’Imprimerie Nationale.