Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Correspondance, tome IV.djvu/310

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point votre article sur les Misérables m’a charmé et touché[1]. Cette forte et pénétrante analyse, cette intuition de la pensée de l’auteur et cette acceptation généreuse de la question sociale et de la question humaine dans ce qu’elles ont de plus poignant et de plus redoutable, tout cela, Monsieur, donne à ces quelques colonnes une rare valeur. Vous êtes de ceux qui, dans notre temps, constatent la puissance et la dignité de l’écrivain par leur exemple ; vous joignez à un talent charmant une âme solide — cette fermeté de la conscience, je la retrouve dans votre article, elle en inspire les plus nobles lignes, et je suis heureux qu’une occasion me soit donnée par vous-même de vous dire, du fond du cœur, que je suis votre ami.

Victor Hugo.

J’ai écrit à M. Louis Huart il y a quinze jours ; j’ai plus d’une raison de croire que mon envoi ne lui est pas parvenu. Soyez assez bon pour lui transmettre mon serrement de main[2].


À Albert Lacroix[3].


H.-H., dim. 27 [avril 1862].

Je vous réponds en hâte, mon cher monsieur. Sitôt votre lettre reçue, j’ai vu le prévôt de la reine, le notaire et le consul. Tous m’ont prévenu que rien ne pouvait m’ôter la responsabilité vis-à-vis du tiers qui ferait les frais de procès et de poursuite, si les poursuites étaient faites en vertu d’une procuration de moi, et qu’il fallait absolument que la procuration vînt de vous. J’ai demandé si une contre-lettre à moi adressée par la personne même à qui je donnerais procuration suffirait pour me couvrir[4]. Ils m’ont unanimement répondu que non. Il m’est donc absolument impossible de faire ce que vous désirez ; je vous donnerai, aux termes du traité, tout appui, en dehors des frais à incomber. L’avis unanime des gens de loi compétents ici est que vous ne pouvez vous soustraire à l’enregistrement de votre traité dans les pays où vous voudrez poursuivre, et que, pour éviter ces frais, vous feriez retomber sur moi, contrairement à ce qui est convenu, toutes les éventualités pécuniaires et tous les risques de procès. Je crois que, si vous voulez poursuivre, vous n’avez pas à hésiter, et vous devez prendre titre vous-même ;

  1. Le Charivari, 20 avril 1862.
  2. Communiquée par M. J.-B. Barrère, petit-neveu de Clément Caraguel.
  3. Inédite.
  4. Par une lettre du 24 avril, Lacroix demandait à Victor Hugo de lui envoyer, légalisée et par-devant notaire, sa procuration au nom de M. Daelli, éditeur à Milan, pour poursuivre les contrefacteurs des Misérables. Il demandait en même temps trois ou quatre procurations avec les noms des éditeurs en blanc pour les autres pays.