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LE RHIN.

une des terres qu’il aime et une des nations qu’il admire. Il a presque un sentiment filial pour cette noble et sainte patrie de tous les penseurs. S’il n’était pas français, il voudrait être allemand.

L’auteur ne croit pas devoir achever cette note préliminaire sans entretenir les lecteurs d’un dernier scrupule qui lui est survenu. Au moment où l’impression de ce livre se terminait, il s’est aperçu que des événements tout récents et qui, à l’instant même où nous sommes, occupent encore Paris, semblaient donner la valeur d’une application directe à deux lignes du paragraphe XV de la Conclusion. Or, l’auteur ayant toujours eu plutôt pour but de calmer que d’irriter, il se demanda s’il n’effacerait pas ces deux lignes. Après réflexion, il s’est décidé à les maintenir. Il suffit d’examiner la date où ces lignes ont été écrites pour reconnaître que, s’il y avait à cette époque-là quelque chose dans l’esprit de l’auteur, c’était peut-être une prévision, ce n’était pas, à coup sûr, et ce ne pouvait être une application. Si l’on se reporte aux faits généraux de notre temps, on verra que cette prévision a pu en résulter, même dans la forme précise que le hasard lui a donnée. En admettant que ces deux lignes aient un sens, ce ne sont pas elles qui sont venues se superposer aux événements, ce sont les événements qui sont venus se ranger sous elles. Il n’est pas d’écrivain un peu réfléchi auquel cela ne soit arrivé. Quelquefois, à force d’étudier le présent, on rencontre quelque chose qui ressemble à l’avenir. Il a donc laissé ces deux lignes à leur place, de même qu’il s’était déjà déterminé à laisser dans le recueil intitulé les Feuilles d’automne les vers intitulés Rêverie d’un paßant à propos d’un roi, petit poëme écrit en juin 1830 qui annonce la révolution de juillet.

Pour ce qui est de ces deux volumes en eux-mêmes, l’auteur n’a plus rien à en dire. S’ils ne se dérobaient par leur peu de valeur à l’honneur des assimilations et des comparaisons, l’auteur ne pourrait s’empêcher de faire remarquer que cet ouvrage, qui a un fleuve pour sujet, s’est, par une coïncidence bizarre, produit lui-même tout spontanément et tout naturellement à l’image d’un fleuve. Il commence comme un ruisseau ; traverse un ravin près d’un groupe de chaumières, sous un petit pont d’une arche ; côtoie l’auberge dans le vil-