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HEIDELBERG.

Trois du dix-septième, le palais de Frédéric IV, le palais de Frédéric V et le palais d’Élisabeth.

Sa ruine se compose aujourd’hui de toutes ces ruines.

Sans compter les tourelles, les gloriettes et les lanternes-escaliers du dedans, il y avait neuf tours extérieures :

La tour Charles ;

La Rondelle ;

La Grosse-Tour ;

La tour de Frédéric le Victorieux ;

La tour Jamais-Vide ;

La tour de Communication ;

La tour du Géant ;

La tour Octogone ;

Et cette tour de la Librairie qui a renfermé la Bibliothèque palatine du Vatican, et dont en 1622 les manuscrits grecs et les missels byzantins servirent de litière, faute de paille, aux chevaux de l’armée impériale.

Cinq de ces tours subsistent encore :

La tour de la Librairie ;

La tour Octogone ;

La Grosse-Tour ;

La tour Fendue ;

Et la tour du Géant, la seule qui soit carrée.

Bizarre destinée ! ce prodigieux palais, qui a été le théâtre des fêtes et des guerres, qui a été la demeure des comtes du Rhin et des ducs de Bavière, des rois de Bohème et des empereurs d’Allemagne, n’est plus aujourd’hui que l’enveloppe compliquée d’un tonneau.

Le souterrain de Tournus est une église, le souterrain de Saint-Denis est un sépulcre, le souterrain de Heidelberg est une cave.

Quand on a traversé ces décombres grandioses, cet écroulement épique, ces salles d’armes démolies, ces palais pleins de mousses, de ronces, d’ombre et d’oubli, ces tours qui ont chancelé comme des hommes ivres et qui sont tombées comme des hommes morts, ces vastes cours où, il y a deux cents ans à peine, le lansquenet se tenait debout sur le perron, la pique haute, tout ce grand édifice et toute cette grande histoire, un homme vient à vous avec une lanterne, vous ouvre une porte basse, vous montre un escalier sombre, et vous fait signe de descendre. On descend, la voûte est obscure, la crypte est recueillie. Les soupiraux jettent un demi-jour religieux, on s’attend aux tombeaux des palatins, on trouve une grosse tonne, une fantaisie pantagruélique, un trône pour un Ramponneau colossal. Quand on aperçoit cette chose étrange, on croit en-