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autour de pasages.




promenades dans la montagne.
écrit en marchant.




I


3 août. — 5 heures après midi

En me promenant dans la rade, j’ai aperçu une espèce de ruine au haut d’une montagne. Cette ruine n’a en aucune façon le profil d’une ruine ancienne. C’est une démolition moderne et probablement récente. Les anglais pendant leur séjour à Pasages, les carlistes et les cristinos pendant la dernière guerre, ont bâti des forts sur les hauteurs ; c’est sans doute un de ces forts qu’on aura jeté bas depuis. Je vais le visiter.

Je gravis la montagne. Il y a apparemment un sentier, mais je ne le connais pas. Je vais à l’aventure à travers les genêts. L’ascension est longue, presque à pic, assez pénible. À mi-côte, je m’assieds dans les grès.

L’horizon s’est élevé, la mer reparaît là-bas. Les grelots des chèvres qui broutent dans le précipice viennent jusqu’à moi. Je vois près de mon pied un beau bupreste vert semé de taches d’or.

Je reprends l’escalade du mont ; le sommet se courbe et s’arrondit ; elle devient plus facile.

J’arrive à la ruine. Une cheminée de pierre, noire de fumée, se dresse au-dessus de la muraille.

Immense tas de pierres de taille démolies. Fossé plein de décombres. J’escalade les pierres. Elles sont mêlées de tuiles et de briques cassées. Je suis sur le plateau.

Voie à rouler les canons, dallée, toute neuve et qu’on dirait faite d’hier. L’herbe croît pourtant dans les intervalles des dalles.

J’entre dans la première masure. — Chambre carrée en pierre. — Gros mur épais. — Trois meurtrières sur les maisons de Pasages. — Au milieu une énorme cheminée en pierre et en brique, celle dont j’apercevais le tuyau, toute démolie, d’un aspect étrange. — Plusieurs compartiments en briques, cubiques et circulaires ; probablement un four à rougir les boulets.