Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Histoire, tome I.djvu/332

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sait, en tournant, dans un long corridor, nommé galerie Mercière. Vers le milieu de ce corridor, on rencontrait deux portes, l’une à droite qui menait à la cour d’appel, l’autre à gauche qui menait à la cour de cassation. La porte de gauche ouvrait à deux battants sur une ancienne galerie, dite de Saint-Louis, récemment restaurée, et qui sert aujourd’hui de salle des Pas-Perdus aux avocats de la cour de cassation. Une statue de saint Louis en bois faisait face à la porte d’entrée. Une entrée, pratiquée dans un pan coupé à droite de cette statue, débouchait sur un couloir tournant terminé par une sorte de cul-de-sac que fermaient en apparence deux doubles portes. Sur la porte de droite on lisait : Cabinet de M. le premier président ; sur la porte de gauche : Chambre du conseil. Entre les deux portes on avait ménagé, pour servir de passage aux avocats qui allaient à la salle de la chambre civile, qui est l’ancienne grand’chambre du parlement, une sorte de boyau étroit et obscur dans lequel, selon l’expression de l’un d’eux, on aurait pu commettre tous les crimes impunément.

Si on laissait de côté le cabinet du premier président et si l’on ouvrait la porte sur laquelle était écrit Chambre du conseil, on traversait une grande pièce, meublée d’une vaste table en fer à cheval qu’entouraient des chaises vertes. Au fond de cette chambre, qui servait en 1793 de salle de délibération aux jurés du tribunal révolutionnaire, une porte coupée dans la boiserie donnait entrée dans un petit couloir où l’on trouvait deux portes, à droite la porte du cabinet du président de la chambre criminelle, à gauche la porte de la buvette. – À mort, et allons dîner ! – ces choses se touchent depuis des siècles. Une troisième porte fermait l’extrémité de ce couloir. Cette porte était, pour ainsi dire, la dernière du palais de justice, la plus lointaine, la plus inconnue, la plus perdue ; elle s’ouvrait sur ce qu’on appelle la bibliothèque de la cour de cassation, spacieuse salle en forme d’équerre, éclairée de deux fenêtres donnant sur le grand préau intérieur de la Conciergerie, meublée de quelques chaises de cuir, d’une grande table à tapis vert, et de livres de droit couvrant les murs du plancher jusqu’au plafond.

Cette salle, on le voit, est la plus retirée et la plus cachée qu’il y ait dans le palais.

Ce fut là, dans cette salle, qu’arrivèrent successivement le 2 décembre, vers onze heures du matin, plusieurs hommes vêtus de noir, sans robes, sans insignes, effarés, désorientés, hochant la tête et se parlant bas. Ces hommes tremblants, c’était la Haute Cour de justice.

La Haute Cour de justice se composait, aux termes de la Constitution, de sept magistrats : un président, quatre juges et deux suppléants choisis par la cour de cassation parmi ses propres membres et renouvelés tous les ans.

En décembre 1851 ces sept juges suprêmes s’appelaient Hardouin, Pataille,