Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Histoire, tome II.djvu/26

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de leurs séances, et l’ayant trouvé entouré de la force armée qui leur en a interdit l’accès, protestent contre l’acte qui a prononcé la dissolution du conseil d’État, et déclarent n’avoir cessé leurs fonctions qu’empêchés par la force.

»Paris, ce 3 décembre 1851.

»Signé : BETHMONT, VIVIEN, BUREAU DE PUZY, STOURM, ED. CHARTON, CUVIER, DE RENNEVILLE, HORACE SAY, BOULATIGNIER, GAUTHIER DE RUMILLY, DE JOUVENCEL, DUNOYER, CARTERET, DE FRESNE, BOUCHENÉ-LEFER, RIVET, BOUDET, CORMENIN, PONS (DE L’HÉRAULT). »

Disons comment s’était passée l’aventure du conseil d’État.

Louis Bonaparte avait fait expulser l’Assemblée par l’armée, la Haute Cour par la police ; il fit expulser le conseil d’État par le portier.

Le 2 décembre au matin, à l’heure même où les représentants de la droite allaient de chez M. Daru à la mairie du Xe arrondissement, les conseillers d’État se rendaient à l’hôtel du quai d’Orsay. Ils entrèrent un à un.

Le quai était couvert de soldats. Un régiment y bivouaquait, avec les fusils en faisceaux.

Les conseillers d’État furent bientôt une trentaine. Ils se mirent à délibérer. Un projet de protestation fut rédigé. Au moment où on allait le signer, le portier, pâle, entra. Il balbutiait. Il déclara qu’il exécutait des ordres, et il leur enjoignit de sortir.

Sur ce, quelques conseillers d’État déclarèrent que, si indignés qu’ils fussent, ils ne mettraient pas leur signature à côté des signatures républicaines.

Manière d’obéir au portier.

M. Bethmont, l’un des présidents du conseil d’État, offrit sa maison. Il demeurait rue Saint-Romain. Les membres républicains y allèrent, et signèrent, sans discussion, la protestation qu’on vient de lire.

Quelques membres, qui demeuraient dans des quartiers éloignés, n’avaient pu venir au rendez-vous. Le plus jeune des conseillers d’État, homme d’un ferme cœur et d’un noble esprit, M. Edouard Charton, se chargea de porter la protestation aux collègues absents.

Il le fit, non sans danger, à pied, n’ayant pu trouver de voiture, arrêté par les soldats, menacé d’être fouillé, ce qui eût été périlleux. Il parvint cependant chez quelques-uns des conseillers d’État. Plusieurs signèrent, Pons (de l’Hérault) résolûment, Cormenin avec une sorte de fièvre, Boudet après