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ODES ET BALLADES.


IV



C’en est fait maintenant, pareils aux hirondelles,
Partez ; qu’un même but vous retrouve fidèles.
Et moi, pourvu qu’en vos combats
De votre foi nul cœur ne doute,
Et qu’une âme en secret écoute
Ce que vous lui direz tout bas ;

Pourvu, quand sur les flots en vingt courants contraires
L’ouragan chassera vos voiles téméraires,
Qu’un seul ami, plaignant mon sort,
Vous voyant battus de l’orage,
Pose un fanal sur le rivage,
S’afflige, et vous souhaite un port ;

D’un œil moins désolé je verrai vos naufrages.
Mais le temps presse, allez ! rassemblez vos courages ;
Il faut combattre les méchants.
C’est un sceptre aussi que la lyre !
Dieu, dont nos âmes sont l’empire,
À mis un pouvoir dans les chants.

V



Le poëte, inspiré lorsque la terre ignore,
Ressemble à ces grands monts que la nouvelle aurore
Dore avant tous à son réveil,
Et qui, longtemps vainqueurs de l’ombre,
Gardent jusque dans la nuit sombre
Le dernier rayon du soleil.


1823.