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LE SACRE DE CHARLES X.

Du pontife endormi profanant le front pâle,
De sa tunique épiscopale
Ils déchirèrent les lambeaux ;
Car ils bravaient la mort dans sa majesté sainte ;
Et les vieillards souvent s’écriaient, pleins de crainte :
— Que leur ont donc fait les tombeaux ?

Mais, trompant des vautours la fureur criminelle,
Dieu garda sa colombe au lys abandonné.
Elle va sur un roi poser encor son aile :
Ce bonheur à Charle est donné !
Charles sera sacré suivant l’ancien usage,
Comme Salomon, le roi sage,
Qui goûta les célestes mets,
Quand Sadoch et Nathan d’un baume l’arrosèrent,
Et, s’approchant de lui, sur le front le baisèrent,
En disant : Qu’il vive à jamais !

IV



Le vieux pays des francs, parmi ses métropoles,
Compte une église illustre, où venaient tous nos rois,
De ce pas triomphant dont tremblent les deux pôles,
S’humilier devant la croix.
Le peuple en racontait cent prodiges antiques :
Ce temple a des voûtes gothiques,
Dont les saints aimaient les détours ;
Un séraphin veillait à ses portes fermées ;
Et les anges du ciel, quand passaient leurs armées,
Plantaient leurs drapeaux sur ses tours !

C’est là que pour la fête on dresse des trophées.
L’or, la moire et l’azur parent les noirs piliers,
Comme un de ces palais où voltigeaient les fées,
Dans les rêves des chevaliers.