Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome II.djvu/375

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I


Il est mort. Rien de plus. Nul groupe populaire,
urne d’où se répand l’amour ou la colère,
n’a jeté sur son nom pitié, gloire ou respect.
Aucun signe n’a lui. Rien n’a changé l’aspect
De ce siècle orageux, mer de récifs bordée,
Où le fait, ce flot sombre, écume sur l’idée.
Nul temple n’a gémi dans nos villes. Nul glas
N’a passé sur nos fronts criant : hélas ! hélas !
La presse aux mille voix, cette louve hargneuse,
A peine a retourné sa tête dédaigneuse ;
Nous ne l’avons pas vue, irritée et grondant,
Donner à cette pourpre un dernier coup de dents.
Et chacun vers son but, la marée à la grève,
La foule vers l’argent, le penseur vers son rêve,
Tout a continué de marcher, de courir,
Et rien n’a dit au monde : Un roi vient de mourir !

II


Sombres canons rangés devant les Invalides,
Comme les sphinx au pied des grandes pyramides,
Dragons d’airain, hideux, verts, énormes, béants,
Gardiens de ce palais, bâti pour des géants,
Qui dresse et fait au loin reluire à la lumière