Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome II.djvu/384

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Silence à son tombeau ! car tout vient de finir.
A peine il aura teint d’un vague souvenir
Le peuple à l’eau pareil, qui passe, clair ou sombre,
Près de tout sans en prendre autre chose que l’ombre !

Je n’aurai pas pour lui de reproches amers.
Je ne suis pas l’oiseau qui crie au bord des mers
Et qui, voyant tomber la foudre des nuées,
Jette aux marins perdus ses sinistres huées.
Des passions de tous isolé bien souvent,
Je n’ai jamais cherché les baisers que nous vend
Et l’hymne dont nous berce avec sa voix flatteuse
La popularité, cette grande menteuse.
Aussi n’attendez pas que j’achète aujourd’hui
Des louanges pour moi par des affronts pour lui.
Qu’un autre, aux rois déchus donnant un nom sévère,
Fasse un vil pilori de leur fatal calvaire ;
Moi je n’affligerai pas plus, ô Charles dix,
Ton cercueil maintenant que ton exil jadis !

IX


Repose, fils de France, en ta tombe exilée !
Dormez, sire ! – Il convient que cette ombre voilée,
Que ce vieux pasteur mort sans peuple et sans troupeaux,
Roi presque séculaire, ait au moins le repos,
Qu’il ait au moins la paix où la mort nous convie,
Puisqu’il eut le travail d’une si dure vie !
Peuple ! soyons cléments ! soyons forts ! oublions !
Jamais l’odeur des morts n’attire les lions.
La haine d’un grand peuple est une haine grande
Qui veut que le pardon au sépulcre descende
Et n’a pour ennemis que ceux qui sont debout.
Hélas ! quel poids encor pourrions-nous après tout