Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome X.djvu/415

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Soit. Mais quoi que ce soit qui ressemble à la haine
N’est pas le dénouement, et l’aurore est certaine ;
C’est au bonheur que doit, quoi qu’on fasse, aboutir
L’effort humain, ce sombre et souriant martyr ;
La vie aux yeux sereins sort toujours de la tombe ;
Tout déluge a pour fin le vol d’une colombe ;
Jamais l’espoir sacré n’a dit : Je me trompais.
Oh ! ne vous lassez point, penseurs ; versez la paix,
Versez la foi, versez l’idée et la prière,
Et sur ces flots de nuit des torrents de lumière !
Gloire à Dieu ! nul progrès ne se fait à demi.
Le malheur du méchant, le deuil de l’ennemi,
Non, ce n’est pas le but, sous ce ciel qui déborde
De bonté, de pardon, d’extase et de concorde.
Vivants, toutes les fois que ce globe de fer
Ébauche un peu d’éden, ruine un peu d’enfer,
Et qu’un écueil s’écroule, et qu’un phare flamboie,
Et que les nations font des pas vers la joie
En luttant, en cherchant, en priant, en aimant,
Le ciel rayonne et semble un grand consentement.

Les mains se chercheront de loin ; tous les contraires,
Désarmés, attendris, calmés, deviendront frères ;
Nous verrons se confondre en douces unions
Ce que nous acceptons et ce que nous nions ;
Les parfums sortiront à travers les écorces ;
L’idée éclairera l’aveuglement des forces ;
L’antique antagonisme entre l’âme et le corps
Sera comme une lyre aux célestes accords ;
Le souffle baisera l’argile, et la matière
Plongera dans l’esprit sa farouche frontière ;