Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome XII.djvu/232

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Et que la nature ait pour voeu
D’ôter l’aube du cimetière,
D’épaissir l’horreur, la matière
Et l’énigme entre l’homme et Dieu !

Est-ce donc qu’ils sont nécessaires
Tous ces fléaux dont nous souffrons ?
Pourquoi cet arbre des misères
Croisant ses branches sur nos fronts ?
Le mal nous tient. Où sont les causes ?
On dirait que le but des’choses
Est de cacher Dieu qui nous fuit,
Que le prodige obscur nous raille,
Et que le. monde entier travaille
A la croissance de la nuit.
Que regarde dans les bois fauves
Le grand cerf à l’oeil égaré ?
Vénus, qui luis sur les monts chauves,
D’où te vient ton rayon sacré ?
Qu’est-ce que ton anneau, Saturne ?
Est-ce que quelque être nocturne,
Quelque vaste archange puni,
Quelque Satan -dont le front plie,
Fait tourner sûr cette poulie
La chaîne, du puits infini ?

Que tu menaces ou promettes,
Dis-nous le secret de tes pleurs ;
Aube ? Et vous, qu’êtes-vous, comètes,
Faces aux horribles pâleurs ?
Êtes,-vous, dans l’éther qui roule,
Des étoiles dont le sang coule,
Faisant des mares de clarté ?
Venez-vous des noirs ossuaires ?
Êtes-vous, traînant vos suaires,
Les mortes de l’immensité ?