Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome XII.djvu/294

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II Deux beaux enfants,


Deux beaux enfants, Chromis et le berger Mnasyle
Ont vu Silène au fond d'une grotte endormi,
 
Seul, et comme toujours, ivre plus qu'à demi.
Ses bandelettes d'or se déroulaient dans l'antre;
Sa cruche était cassée et gisait sur le ventre.
Tous deux pour le saisir ont profité du lieu;
Avec la bandelette ils ont lié le dieu,
Vieux chanteur qui souvent leur manqua de parole.
Eglé, la belle nymphe, Eglé, la belle folle,
Survient, les encourage, et redouble les noeuds;
Et, quoique le vieillard rouvre déjà les yeux,
Elle lui peint la face au milieu des risées
Avec le sang vermeil des mûres écrasées.
Lui s'éveille et sourit.
-Laissez-moi libre, amis,
Et vous aurez les chants que je vous ai promis;
Acceptez la rançon qu'ici je vous propose;
J'ai pour vous des chansons et pour elle autre chose. -
Puis il commence et chante.
Alors, à cette voix,
On vit les daims, les loups et les bêtes des bois
Se mêler aux sylvains dans une étrange danse,
Et les chênes pensifs agiter en cadence
Leur front d'où l'ombre au loin tombe sur le vallon.
Le rocher du Parnasse est moins fier d'Apollon,
Et Rhodope et l'Ismare écoutent moins Orphée.

III Sur la coupe