Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome XIII.djvu/234

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Nous prenons tin coquin,-faux boiteux, faux aveugle,
Nous l’offrons gentiment à Bellone qui beugle,
Et plus tard il aura, rampant sur les pavés,
La jambe de bois vraie et de vrais yeux crevés.
Nous montrons à qui veut les voir nos — tours fort drôles,
Nos trucs, nos fleurs de lys, parfois sur nos épaules,
Nos façons de tricher aux cartes, nos galons,
Nos plumets, notre sabre. et jamais nds talons. —
Nous régnons ; nous dressons nos fières silhouettes,
Étant tous très voleurs et même un peu poëtes.
On nous suit. Si ce n’est de force, c’est de gré.
Que c’est beau, l’épaulette et le colback tigré !
Qui veut de l’or ? Venez, manants. Notre escarcelle
S.offre, brille, éblouit le pauvre, et le harcèle.
Quand nous voyons passer des moines, nous louchons
Du côté de ces gars masqués de capuchons ;
En fait de va-nu-pieds, nous préférons les carmes ;
 
Pour les guerres, les camps, les clairons, les vacarmes,
Les sacs et les viols, on prend des assassins
Et des larrons, à moins qu’on n’ait des capucins ;
Les abbés défroqués sont d’admirables reîtres
Et nos meilleurs bandits sont faits avec des prêtres ;
Un casque sied au prêtre aussi bien qu’un turban.

(Une pause.)

Beau sexe, attention ! Tambours, battez un ban.
En pêchant ces messieurs les héros en eau trouble,
On sert Mars et Vénus, et nous faisons coup double.
Les dames, grâce à nous, ne manquent point d’amants
Vu que nous fournissons l’état de garnements.
L’enfant Amour, crieur public, annonce et braille
Le départ pour Cythère au quai de la Ferraille ;
Cypris, étant déesse et toute nue, aurait
Grand tort de ne point suivre Ajax au cabaret ;
Achille a pour Catau des façons très civiles.
Les grenadiers — battez tambours ! — ça prend les villes
Et les mentons ; c’est gai, féroce et tapageur.