Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome XIII.djvu/358

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XIX LA QUESTION SOCIALE



Non, non, non. Ce n'est point par la ruse, vous dis-je,
Que vous aurez raison du gouffre et du prodige;
Les ouragans ne sont en rien déconcertés
Par nos expédients et nos habiletés;
Non, je ne pense pas que l'aquilon s'apaise
Par égard pour Blondin flottant dans son trapèze,
Ni qu'un homme d'état fasse peur à l'éclair.
A force de danser sur une corde en l'air;
 
Le tonnerre n'est pas un chien hargneux qui boite
Et que nos coups de fouet font rentrer dans-sa boîte.
Jésus-Christ, tel qu'il est, dans saint-Luc et saint-Marc,
Voyait la politique autrement que Bismarck
Et voyait la justice autrement que Delangle;
A l'homme qu'on assomme, à l'homme qu'on étrangle,
Il prodiguait les soins du bon samaritain;
Si des vaincus tâchaient d'échapper au destin,
Son temple offrait l'asile à leur fuite tragique;
Si bien qu'on l'aurait, certe, expulsé de Belgique.

Ô mer, à ton niveau fatal tu monteras.
Il n'est pas d'empereurs et pas de magistrats,
II n'est pas de trident, gouffre, il n'est pas de conque,
Qui puissent à ton flot faire un effet quelconque;
L'abîme est la demeure orageuse de Dieu;
On ne calmera pas cet effrayant milieu
Quand même on enverrait des nymphes ingénues