Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome XIII.djvu/68

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XXXII SOUFFREZ, ô PRÉCURSEURS!


Malheur dans les bas-fonds, malheur sur les hauteurs,
A vous, penseurs, esprits, marcheurs, libérateurs!
L'ignorance ne sait que jeter de la haine;
L'esclave mord la main qui vient briser sa chaîne;
L'enfer punit quiconque a rêvé paradis.
Nous étions les proscrits, nous étions les maudits;
 
Et cinq ans, et dix ans, et vingt ans nous vécûmes
D'outrages, de fureurs, de cris, d'affronts, d'écumes;
Tous; ceux-ci dans l'exil, ceux-là sous les barreaux.
Le progrès est un char que fouettent lès bourreaux,
Qui pour ornière a l'ombre et le sang, et pour roue
Le martyre. Qu'un homme aux hommes se dévoile,
Hélas, c'est la première énigme qu'ici-bas
L'homme ne comprend pas et ne devine pas;
C'est ce qui fait grandir les épines aiguës,
C'est ce qui fait pousser dans l'ombre les ciguës.

XXXIII L'aquilon change,