Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Roman, tome I.djvu/123

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Cela dépend du genre de sacrilège, répondit le bourreau.

— Si le sacrilège est la profanation d’un mort ?

Pour le coup, le tremblant Benignus s’attendit à voir son nom sortir d’un moment à l’autre de la bouche de l’inexplicable ermite.

— Autrefois, dit froidement Orugix, on l’enterrait vivant avec le cadavre profané.

— Et maintenant ?

— Maintenant on est plus doux.

— On est plus doux ! dit Spiagudry, respirant à peine.

— Oui, reprit le bourreau de l’air satisfait et négligent d’un artiste qui parle de son art ; on lui imprime d’abord, avec un fer chaud, une S sur le gras des jambes.

— Et ensuite ? interrompit le vieux concierge, contre lequel il eût été difficile d’exécuter cette partie de la peine.

— Ensuite, dit le bourreau, on se contente de le pendre.

— Miséricorde ! s’écria Spiagudry ; de le pendre !

— Eh bien, qu’a-t-il ? il me regarde de l’air dont le patient regarde le gibet.

— Je vois avec plaisir, disait l’ermite, que l’on est revenu à des principes d’humanité.

En ce moment, l’orage, qui avait cessé, permit d’entendre très distinctement au dehors le son clair et intermittent d’un cor.

— Nychol, dit la femme, on est à la poursuite de quelque malfaiteur, c’est le cor des archers.

— Le cor des archers ! répéta chacun des interlocuteurs avec un accent différent, mais Spiagudry avec celui de la plus profonde terreur.

Ils achevaient à peine cette exclamation quand on frappa à la porte de la tour.