Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Roman, tome I.djvu/358

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CONCLUSION.


Ce que j’avais dit par plaisanterie, vous l’avez pris sérieusement.
Romances espagnoles, le roi Alphonse à Bernard.



Depuis quinze jours, les évènements que nous venons de raconter occupaient toutes les conversations de Drontheim et du Drontheimhus, jugés selon les diverses faces qu’ils avaient présentées au jour. La populace de la ville, qui s’était vainement attendue au spectacle de sept exécutions successives, commençait à désespérer de ce plaisir ; et les vieilles femmes, à demi aveugles, racontaient encore qu’elles avaient vu, la nuit du déplorable embrasement de la caserne, Han d’Islande s’envoler dans une flamme, riant dans l’incendie, et poussant du pied la toiture brûlante de l’édifice sur les arquebusiers de Munckholm, lorsque, après une absence qui avait semblé bien longue à son Éthel, Ordener reparut dans le donjon du Lion de Slesvig, accompagné du général Levin de Knud et de l’aumônier Athanase Munder.

Schumacker se promenait en ce moment dans le jardin, appuyé sur sa fille. Les deux jeunes époux eurent bien de la peine à ne point tomber dans les bras l’un de l’autre ; il fallut encore se contenter d’un regard. Schumacker serra affectueusement la main d’Ordener et salua d’un air de bienveillance les deux étrangers.

— Jeune homme, dit le vieux captif, que le ciel bénisse votre retour !

— Seigneur, répondit Ordener, j’arrive. Je viens de voir mon père de Bergen, je reviens embrasser mon père de Drontheim.

— Que voulez-vous dire ? demanda le vieillard étonné.

— Que vous me donniez votre fille, noble seigneur.

— Ma fille ! s’écria le prisonnier, se tournant vers Éthel rouge et tremblante.

— Oui, seigneur, j’aime votre Éthel ; je lui ai consacré ma vie ; elle est à moi.

Le front de Schumacker se rembrunit :

— Vous êtes un noble et digne jeune homme, mon fils ; quoique votre père m’ait fait bien du mal, je le lui pardonne en votre faveur, et je verrais volontiers cette union. Mais il y a un obstacle.