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tilly. En juillet, il était réinstallé à Paris. Le mariage eut lieu le 12 octobre 1822. Victor Hugo acheva son roman dans les premiers mois qui suivirent et vendit la première édition mille francs à M. Persan, un marquis ruiné, qui s’était improvisé libraire.

Le Réveil, dans son numéro du 23 janvier, publiait la note suivante :

M. le vicomte d’Arlincourt serait-il déjà usé comme M. de Pradt et M. de Bignon ; voilà cinq jours que son roman a paru, et personne n’en parle, personne ne le lit, personne ne l’achète ? On nous annonce aujourd’hui comme devant offrir au dédommagement de l’ennui que pourrait causer aux lecteurs (s’il en trouve) le roman d’Ipsiboë, un nouveau qui va paraître dans quelques jours chez les libraires du Palais-Royal et dont le sujet, tiré de l’histoire de la Norwège, offre un intérêt aussi dramatique que les principaux ouvrages de l’illustre romancier écossais. Cette composition singulière, signée Han d’Islande, est, dit-on, le premier ouvrage en prose d’un jeune homme connu déjà par de brillants succès poétiques. Nous verrons bien.

Han d’Islande parut en effet le 8 février 1823, sans nom d’auteur. Louis XVIII avait dit, en regardant l’édition originale des Odes de M. V. Hugo : C’est assez mal fagoté. On en aurait pu dire autant des quatre volumes qui composaient l’édition originale de Han d’Islande : couverture grisaille, papier gris grossier, et, pour le texte, il était plein de fautes.

Cela n’empêcha pas le roman de faire grand bruit, plus encore dans le public que dans la presse. C’était l’époque où, dans le monde des lettres, on se divisait en deux camps : les classiques et les romantiques.

L’anonymat ne fut pas de longue durée.

Le Constitutionnel publiait le 15 février la note suivante :

On vient de mettre en vente chez Persan, rue de l’Arbre-Sec, no 22, un roman intitulé : Han d’Islande, en quatre volumes in-12. Prix : 10 francs. On attribue ce roman à M. Victor Hugo, auteur d’un recueil d’odes.

Un article dans la Quotidienne du 12 mars, signé Charles Nodier, et dont on trouvera des extraits dans la Revue de la critique, eut un grand retentissement. Victor Hugo ne connaissait Charles Nodier que de nom ; il alla le remercier. Nodier n’était pas chez lui. Mais le lendemain il accourut. Victor Hugo venait d’emménager rue de Vaugirard, 90. La connaissance fut rapidement faite, car Charles Nodier fut invité avec sa femme et sa fille à pendre la crémaillère. Ce fut là l’origine de leur amitié.

Une nouvelle édition de Han d’Islande fut mise en vente en avril 1823 et toujours sans nom d’auteur. Victor Hugo expliquait qu’il n’avait pas modifié le roman, qu’il s’était borné à corriger des monstruosités typographiques, à rectifier plusieurs dates, à ajouter quelques notes historiques et des épigraphes nouvelles en tête des chapitres.

Han d’Islande eut, deux ans plus tard, les honneurs d’une traduction anglaise, anonyme il est vrai, mais restée célèbre par les gravures terrifiantes qui l’illustraient. Victor Hugo, dans une lettre datée de Reims, où il était invité au sacre de Charles X, en parle à sa femme :

Quand je reviendrai, je t’apporterai la fameuse traduction anglaise de Han d’Islande avec d’admirables gravures à l’eau-forte de Cruikshank. L’effet n’en est pas agréable, mais elles sont terribles.

En 1832, Victor Hugo signa un traité avec l’éditeur Renduel pour la réimpression des romans publiés par divers éditeurs : Bug-Jargal, Han d’Islande, le Dernier jour d’un Condamné, 1 franc par exemplaire et tirage à mille exemplaires.

En mai 1833, paraissait cette nouvelle édition avec une préface assez longue dans laquelle Victor Hugo jugeait en critique sa première tentative de 1823 ; il en avait sans doute l’opinion que lui