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BUG-JARGAL.

lui inspirer de la terreur. Ces êtres ne sont nullement familiers au jeune auteur, on s’en aperçoit au soin avec lequel il nous les fait connaître dans les moindres détails, ce qui les rend parfois lourds et monotones. Cependant, il y a sous ce rapport une distinction essentielle à faire entre M. Victor Hugo et l’écrivain écossais. Walter Scott est, sans contredit, bien autrement le maître de son talent et de sa diction que son jeune rival, qui entre à peine dans la carrière. Son imagination est aussi plus riche, plus féconde, plus originale, mais en compensation bien moins profonde. Cela tient peut-être au protestantisme qui perce dans chacun des ouvrages de Walter Scott, avec un cortège de préjugés souvent de l’espèce la plus commune. M. Hugo est catholique, par un sentiment intime, ce qui lui suffit pour s’élever par la pensée à une très grande hauteur.

Il est donc bien plus capable d’embrasser des données poétiques du genre de celles où paraissent des êtres surnaturels et extraordinaires, des caractères sublimes et imposants, bizarres et fantastiques. S’il se sent une vocation bien prononcée pour lire dans les cieux ou pour évoquer les enfers, qu’il étudie, et il réussira.

… Nous n’avons maintenant qu’à louer sous beaucoup de rapports, tout en lui reprochant un défaut général d’harmonie et d’ensemble dans les formes du style et des disparates qui décèlent les efforts qu’il a dû faire pour nous présenter une nature qu’il n’a jamais contemplée, ce qui le force à recourir à la nomenclature des botanistes pour nous en offrir une image. Nous tiendrons compte à l’auteur des difficultés attachées à son entreprise lorsqu’il a voulu nous faire connaître le genre bizarre d’hommes et de peuples étrangers, ce qui l’a souvent obligé de consulter les récits des voyageurs, érudition dont l’ensemble de ses compositions porte visiblement l’empreinte ; mais nous ne pouvons du reste qu’admirer les dons du cœur et de l’esprit, l’imagination forte et puissante, le pouvoir de conception et de pensée qui distinguent ce jeune disciple des muses. Il est parfois véritablement inspiré, il crée alors des scènes extraordinaires et dramatiques, il a du pathétique dans l’expression et une grande chaleur dans les sentiments. Il ne faut pas s’étonner si avec tant d’éminentes qualités il lui manque cette maturité d’esprit et de jugement qui ne s’acquièrent qu’avec l’âge.


III

NOTICE BIBLIOGRAPHIQUE.


Bug-Jargal, par l’auteur de Han d’Islande. — Paris, Urbain Canel, libraire, rue Saint-Germain-des-Prés, no 9 (imprimerie Lachevardière fils, rue du Colombier, no 30), 1826, in-12, couverture imprimée. Frontispice par Devéria. Édition originale, sans nom d’auteur, publiée à 6 francs.

Bug-Jargal. — Troisième édition. Paris, Charles Gosselin, libraire de S. A. R. Monseigneur le duc de Bordeaux, rue Saint-Germain-des-Prés, no 9 ; Hector Bossange, libraire, quai Voltaire, no 11 (imprimerie Lachevardière), 1829 ; trois volumes in-12, couverture imprimée. Première édition contenant : Une comédie à propos d’une tragédie. Prix : 9 francs les trois volumes.

Bug-Jargal. 1791. — Cinquième édition. Œuvres de Victor Hugo. Roman II. Paris, Eugène Renduel, libraire-éditeur, rue des Grands-Augustins, no 22 (imprimerie Plassan et Cie), 1832, in-8o, couverture imprimée. Prix : 7 fr. 50.

Bug-Jargal…, par Victor Hugo, de l’Académie française. — Paris, Charpentier, libraire-éditeur, rue de Seine, no 29 (imprimerie Béthune et Pion), 1841, in-18, couverture imprimée. Prix : 3 fr. 50.

Bug-Jargal… — — Paris, Furne et Cie libraires-éditeurs, rue Saint-André-des-Arts, no 55 (imprimerie Béthune et Pion), 1841, in-8o. Édition collective.