Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome IV.djvu/40

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Et dire: C'est mon fils! et revivre! Essayons.

Je sens que cet enfant, avec tous ses rayons,

Vient d'entrer dans ma brume, et que cette jeune âme

A pris possession de mon vieux coeur infâme,

De sorte qu'à présent j'ai, pour me surveiller,

De l'innocence en moi qui va me conseiller,

Et je suis un autre homme, et je pleure, et j'adore,

Et ma sinistre nuit voit un lever d'aurore!

A moi cette lumière! à moi cet ingénu!

Vous êtes donc clément, ô Dieu, sombre inconnu?

Moi, guide de ce roi marchant sur des victimes,

Clarté de sa noirceur, courtisan de ses crimes,

Je sens une main douce alléger mes forfaits.

Oh! je respire enfin, moi, l'affreux portefaix,

Ma tête se relève, hélas! de remords pleine,

Et du côté du ciel je puis reprendre haleine!

Oh! je ne suis plus seul, je vis, j'aime, ébloui!

Hélas, il n'a que moi comme je n'ai que lui.

Que de gouffres autour de lui! pièges sans nombre!

Oui, mais je veille .

Pensif.

A lui la lumière, à moi l'ombre.

Restons sous ce manteau sur ma tête étendu.

Le père deviné, l'enfant serait perdu.

Il revient vers le prieur.

Le Prieur, bas.


Monseigneur m'a promis le secret.

Le Marquis


Sois tranquille.

Quand don Sanche doit-il sortir de cet asile?

Le Prieur


L'enfant qu'on a cru mort est un homme aujourd'hui.

Monseigneur le vicomte-abbé se sert de lui,

Et le déclarera comte et roi, prince, altesse,

Lorsqu'il en aura fait le mari de sa nièce.

Il jette un regard en arrière. Le roi reparaît au fond du théâtre.

Le Roi!

Le Marquis


Le roi!