Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome V.djvu/28

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HERR GROOT.

Très pauvre. En vérité, c’est monstrueux. Je crois
Qu’étant savant, il fait des herbiers dans les bois.
Il doit avoir un peu d’argent caché, qu’il mange.

LA MARGRAVE.

Voyons, comprenez-moi, c’est une histoire étrange.
Mon fils Charle est proscrit. Le chef de ma maison,
L’empereur, a banni mon fils avec raison.
Je le cherche. Voilà dix ans qu’il se dérobe.
Cet enfant, qui jadis ne quittait pas ma robe,
Et que j’avais toujours près de moi, maintenant
De fils s’est fait rebelle, et de prince manant.
J’enrageais. Je le hais de braver ma puissance.
L’autre jour tout à coup j’eus vent de sa présence
Dans un pays à moi que je ne connais point ;
Ce duché-ci. J’accours.

HERR GROOT.

Ce duché-ci. J’accours. Le fuyard est rejoint.
Votre duché, madame, étant un lieu d’asile,
Naturellement s’offre à tous ceux qu’on exile.
Du reste, il n’est ici que depuis peu. Vraiment,
On demeure interdit qu’un margrave allemand
Soit venu s’établir dans cet endroit sylvestre.

LA MARGRAVE.

Vous êtes sénéchal, bailli, shériff, bourgmestre.
J’arrive. Informez-moi.

HERR GROOT, lui montrant le château au haut de la colline.

J’arrive. Informez-moi. Voici votre palais.

LA MARGRAVE.

À peine ai-je eu le temps d’en ouvrir les volets.
— Et vous dites qu’il est marié, c’est horrible !

HERR GROOT, saluant.

Marié.