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THÉÂTRE EN LIBERTÉ.

Il sait les simples, lit les livres, voit les âmes ;
On dirait que Jésus, que toujours nous priâmes,
A fait nos cœurs exprès pour qu’il y pénétrât.
Il est le médecin, il est le magistrat.
Albos, son petit-fils, vient et nous le ramène
Après qu’ils ont été passer une semaine,
Albos en chasse, et Pierre en prière, là-haut.

LE CHANTERRE.

En même temps qu’Albos, nous allons voir bientôt
Quelqu’un de grand.

LE MONTAGNARD.

Quelqu’un de grand. Qui donc ?

LE CHANTERRE.

Quelqu’un de grand. Qui donc ? Le duc, sur qui Dieu veille !
Tout à l’heure, en collant à terre mon oreille,
J’ai très distinctement entendu des clairons,
Des chevaux, de la foule, un bruit sourd d’escadrons,
Et j’ai dit : Gloire à Dieu ! gloire à saint Charlemagne !
C’est le bon duc qui vient voir sa bonne montagne.

LE PAYSAN.

C’est la première fois qu’on aura le bonheur
De voir un duc !

UN AUTRE PAYSAN.

De voir un duc ! Son duc à soi ! son vrai seigneur !

LE CHANTERRE, ôtant son bonnet.

Car ces monts n’avaient pas encore eu sa visite.

LE VIEILLARD.

Le visage d’un roi réchauffe et ressuscite.
Qu’il soit le bienvenu !

LE CHANTERRE.

Qu’il soit le bienvenu ! Moi, j’ai vu très souvent,
À la ville, passer son cortège. En avant,