Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome V.djvu/77

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
63
L’ÉPÉE.

Croissez comme les pins, les frênes, les érables,
Et soyez innocents, et soyez vénérables.
Que tout est beau, voyez ! ce bois vert, ce lac bleu,
Le soleil, et le soir tous les astres ! car Dieu
Montre le jour sa face et la nuit sa tiare.
Vivez, aimez.

Un homme vêtu de deuil, barbe et cheveux hérissés, paraît au delà du pont de tronc d’arbre, à l’ouverture de la caverne. C’est Slagistri.
SLAGISTRI.

Vivez, aimez. Et moi, j’affirme et je déclare
Que ce lac n’est pas bleu, que ce bois n’est pas vert,
Que la fleur sent mauvais, que tout d’ombre est couvert,
Que les vierges n’ont pas de beauté sous leurs voiles,
Que l’aurore est lugubre, et qu’il n’est pas d’étoiles
Dans les cieux, tant qu’on a sur la tête un tyran !

CRI DE TOUS.

Slagistri !



SCÈNE TROISIÈME.
SEUL CONTRE TOUS.


Les Mêmes, SLAGISTRI.
SLAGISTRI.

Slagistri.L’homme a le droit de toucher au cadran
Et de mettre le doigt, quand la justice pleure,
Sur l’aiguille de Dieu trop lente à marquer l’heure.
Me voici.

PRÊTRE-PIERRE.

Me voici. C’est toi !

SLAGISTRI.

Me voici. C’est toi ! Moi.

PRÊTRE-PIERRE.

Me voici. C’est toi ! Moi. Pourquoi viens-tu ?