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LA RÉVISION DE LA CONSTITUTION.

teur comme elles sont sorties de la bouche de l’orateur.

M. Victor Hugo. — Messieurs, demain, quand vous lirez le Moniteur… (rumeurs à droite) quand vous y lirez cette phrase que vous avez interrompue et que vous n’avez pas entendue, cette phrase dans laquelle je dis que Napoléon s’étonnerait, s’indignerait de voir que son empire, son glorieux empire, a aujourd’hui pour théoriciens et pour reconstructeurs, qui ? des hommes qui, chaque fois que nous prononçons les mots démocratie, liberté, humanité, progrès, se couchent à plat ventre avec terreur, et se collent l’oreille contre terre pour écouter s’ils n’entendront pas enfin venir le canon russe….

Voix à droite. — À qui appliquez-vous cela ?

M. Victor Hugo. — J’ai été rappelé à l’ordre pour cela !

M. de Tréveneuc. — À quel parti vous adressez-vous ?

Voix à gauche. — À Romieu ! au Spectre rouge !

M. le président, à M. Victor Hugo. — Vous ne pouvez pas isoler une phrase de votre discours entier. Et tout cela est venu à la suite d’une comparaison insultante entre l’empereur qui n’est plus et le président de la république qui existe. (Agitation prolongée. — Un grand nombre de membres descendent dans l’hémicycle ; ce n’est qu’avec peine que, sur l’ordre de M. le président, les huissiers font reprendre les places et ramènent un peu de silence.)

M. Victor Hugo. — Vous reconnaîtrez demain la vérité de mes paroles.

Voix à droite. — Vous avez dit : Vous.

M. Victor Hugo. — Jamais, et je le dis du haut de cette tribune, jamais il n’est entré dans mon esprit un seul instant de s’adresser à qui que ce soit dans l’assemblée. (Réclamations et rires bruyants à droite.)

M. le président. — Alors l’insulte reste tout entière pour M. le président de la république.

M. de Heeckeren[1]. — S’il ne s’agit pas de nous, pourquoi nous le dire, et ne pas réserver la chose pour l’Événement ?

M. Victor Hugo, se tournant vers M. le président. — Vous voyez bien que la majorité se prétend insultée. Ce n’est pas du président de la République qu’il s’agit maintenant !

  1. Sénateur.