Page:Hugo - Actes et paroles - volume 5.djvu/133

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
123
UN CRI.

Est là terrible, et vous, acharnés sur vous-mêmes,
Vous venez, toi rhéteur, toi soldat, toi tribun,
Les envenimer tous sans en résoudre aucun !


Vous recreusez le gouffre au lieu d’y mettre un phare !
Des deux côtés la même exécrable fanfare,
Le même cri : Mort ! Guerre ! — À qui ? réponds, Caïn !
Qu’est-ce que ces soldats une épée à la main,
Courbés devant la Prusse, altiers contre la France ?
Gardez donc votre sang pour votre délivrance !
Quoi ! pas de remords ! quoi ! le désespoir complet !
Mais qui donc sont-ils ceux à qui la honte plaît ?
Ô cieux profonds ! opprobre aux hommes, quels qu’ils soient,
Qui sur ce pavois d’ombre et de meurtre s’assoient,
Qui du malheur public se font un piédestal,
Qui soufflent, acharnés à ce duel fatal,
Sur le peuple indigné, sur le reître servile.
Et sur les deux tisons de la guerre civile ;
Qui remettent la ville éternelle en prison,
Rebâtissent le mur de haine à l’horizon,
Méditent on ne sait quelle victoire infâme,
Les droits brisés, la France assassinant son âme,
Paris mort, l’astre éteint, et qui n’ont pas frémi
Devant l’éclat de rire affreux de l’ennemi !

Bruxelles, 15 avril 1871.