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DEPUIS L’EXIL. — PARIS.

Le premier des devoirs est l’exemple.

Le moment où nous sommes est une grande heure pour les peuples.

Chacun va donner sa mesure.

La France a ce privilège, qu’a eu jadis Rome, qu’a eu jadis la Grèce, que son péril va marquer l’étiage de la civilisation.

Où en est le monde ? Nous allons le voir.

S’il arrivait, ce qui est impossible, que la France succombât, la quantité de submersion qu’elle subirait indiquerait la baisse de niveau du genre humain.

Mais la France ne succombera pas.

Par une raison bien simple, et nous venons de le dire. C’est qu’elle fera son devoir.

La France doit à tous les peuples et à tous les hommes de sauver Paris, non pour Paris, mais pour le monde.

Ce devoir, la France l’accomplira.

Que toutes les communes se lèvent ! que toutes les campagnes prennent feu ! que toutes les forêts s’emplissent de voix tonnantes ! Tocsin ! tocsin ! Que de chaque maison il sorte un soldat ; que le faubourg devienne régiment ; que la ville se fasse armée. Les prussiens sont huit cent mille, vous êtes quarante millions d’hommes. Dressez-vous, et soufflez sur eux ! Lille, Nantes, Tours, Bourges, Orléans, Dijon, Toulouse, Bayonne, ceignez vos reins. En marche ! Lyon, prends ton fusil, Bordeaux, prends ta carabine, Rouen, tire ton épée, et toi Marseille, chante ta chanson et viens terrible. Cités, cités, cités, faites des forêts de piques, épaississez vos bayonnettes, attelez vos canons, et toi village, prends ta fourche. On n’a pas de poudre, on n’a pas de munitions, on n’a pas d’artillerie ? Erreur ! on en a. D’ailleurs les paysans suisses n’avaient que des cognées, les paysans polonais n’avaient que des faulx, les paysans bretons n’avaient que des bâtons. Et tout s’évanouissait devant eux ! Tout est secourable à qui fait bien. Nous sommes chez nous. La saison sera pour