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BUG-JARGAL.
Ils se disaient : c’est un obi !
Ils se disaient : c’est un obi !

V


C’est au milieu de ces illusions et de ces espérances aveugles que j’atteignais ma vingtième année. Elle devait, être accomplie au mois d’août 1791, et mon oncle avait fixé cette époque pour mon union avec Marie. Vous comprenez aisément que la pensée d’un bonheur si prochain absorbait toutes mes facultés, et combien doit être vague le souvenir qui me reste des débats politiques dont à cette époque la colonie était déjà agitée depuis deux ans. Je ne vous entretiendrai donc ni du comte de Peinier, ni de M. de Blanchelande, ni de ce malheureux colonel de Mauduit dont la fin fut si tragique. Je ne vous peindrai point les rivalités de l’assemblée provinciale du Nord, et de cette assemblée coloniale qui prit le titre d’assemblée générale, trouvant que le mot coloniale sentait l’esclavage. Ces misères, qui ont bouleversé alors tous les esprits, n’offrent plus maintenant d’intérêt que par les désastres qu’elles ont produits. Pour moi, dans cette jalousie mutuelle qui divisait le Cap et le Port-au-Prince, si j’avais une opinion, ce devait être nécessairement en faveur du Cap, dont nous habitions le territoire, et de l’assemblée provinciale dont mon oncle était membre.

Il m’arriva une seule fois de prendre une part un peu vive à un débat sur les affaires du