Page:Hugo - L'Année terrible, 1872.djvu/175

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Rayonnaient dans l’azur béant
Où la nuit tend ses sombres toiles,
Et Dieu donna ces deux étoiles
Pour éperons à ce géant.

Les grands cœurs en qui Dieu se crée
Ont, tandis qu’autour d’eux tout fuit,
La curiosité sacrée
Du précipice et de la nuit.
Toute découverte est un gouffre.
Mourir, qu’importe ! on plonge, on souffre ;
Vivre inutile, c’est trop long.
De l’insensé naît le sublime ;
Et derrière lui dans l’abîme
Empédocle attire Colomb.

Mers qu’on sonde ! cieux qu’on révèle !
Chacun de ces chercheurs de Dieu
Prend un infini sur ton aile,
Fulton le vert, Herschell le Bleu ;
Magellan part, Fourier s’envole ;
La foule ironique et frivole
Ignore ce qu’ils ont rêvé,
Les voit sombrer dans l’étendue,
Et dit : C’est une âme perdue.
Foule ! c’est un monde trouvé !