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                       IX

La prisonnière passe, elle est blessée. Elle a
On ne sait quel aveu sur le front. La voilà !
On l’insulte ! Elle a l’air des bêtes à la chaîne.
On la voit à travers un nuage de haine.
Qu’a-t-elle fait ? Cherchez dans l’ombre et dans les cris,
Cherchez dans la fumée affreuse de Paris.
Personne ne le sait. Le sait-elle elle-même ?
Ce qui pour l’homme est crime est pour l’esprit problème.
La faim, quelque conseil ténébreux, un bandit
Si monstrueux qu’on l’aime et qu’on fait ce qu’il dit,
C’est assez pour qu’un être obscur se dénature.
Ce noir plan incliné qu’on nomme l’aventure,
La pente des instincts fauves, le fatal vent
Du malheur en courroux profond se dépravant,
Cette sombre forêt que la guerre civile
Toujours révèle au fond de toute grande ville,
Dire : d’autres ont tout, et moi qu’est-ce que j’ai ?
Songer, être en haillons, et n’avoir pas mangé,