Page:Hugo - L'Année terrible, 1872.djvu/307

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Ils lui reprochent, quoi ? la fin des servitudes,
La chute du mur noir troué par les Latudes,
Le fanal allumé dans l’ombre où nous passions,
Le lever successif des constellations,
Tous ces astres parus au ciel l’un après l’autre,
Molière, ce moqueur pensif comme un apôtre,
Pascal et Diderot, Danton et Mirabeau ;
Ses fautes sont le Vrai, le Bien, le Grand, le Beau ;
Son crime, c’est cette œuvre étoilée et profonde,
La Révolution, par qui renaît le monde,
Cette création deuxième qui refait
L’homme après Christ, après Cécrops, après Japhet.
Là-dessus ces gredins font le procès en règle
A la patrie, à l’ange immense aux ailes d’aigle ;
Elle est vaincue, elle est sanglante ; on crie : A bas
Sa gloire ! à bas ses voeux, ses travaux, ses combats !
Le coupable de tous les désastres, c’est elle !
Et ces pieds ténébreux marchent sur l’immortelle ;
Elle est perverse, absurde et folle ! et chacun d’eux
Sur ce malheur sacré crache un rire hideux.
Or sachez-le, vous tous, toi vil bouffon, toi cuistre,
Mal parler de sa mère est un effort sinistre,
C’est un crime essayé qui fait frémir le ciel,
O monstres, c’est payer son lait avec du fiel,
C’est gangrener sa plaie, envenimer ses fièvres,
Et c’est le parricide, enfin, du bout des lèvres !

Mais quand donc ceux qui font le mal seront-ils las ?