Page:Hugo - L'Art d'être grand-père, 1877.djvu/201

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Imposteur, a rempli cette âme d’imposture ;
L’aveugle a dans ce cœur vidé l’aveuglement.
À ce lugubre élève, à ce maître inclément
Je pardonne ; le mal a des pièges sans nombre ;
Je les plains ; et j’implore au-dessus de nous l’ombre.
Pauvre mère, ton fils ne sait pas ce qu’il fait.
Quand Dieu germait en lui, le prêtre l’étouffait.
Aujourd’hui le voilà dans cette Forêt-noire,
Le dogme ! Ignace ordonne ; il est prêt à tout boire,
Le faux, le vrai, le bien, le mal, l’erreur, le sang !
Tout ! Frappe ! il obéit. Assassine ! il consent.
Hélas ! comment veut-on que je lui sois sévère ?
Le sommet qui fait grâce au gouffre est le Calvaire.
Mornes bourreaux, à nous martyrs vous vous fiez ;
Et nous, les lapidés et les crucifiés,
Nous absolvons le vil caillou, le clou stupide ;
Nous pardonnons. C’est juste. Ah ! ton fils me lapide,
Mère, et je te bénis. Et je fais mon devoir.
Un jour tu mourras, femme, et puisses-tu le voir
Se frapper la poitrine, à genoux sur ta fosse !
Puisse-t-il voir s’éteindre en lui la clarté fausse,
Et sentir dans son cœur s’allumer le vrai feu,
Et croire moins au prêtre et croire plus à Dieu !