Page:Hugo - L'Art d'être grand-père, 1877.djvu/65

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


La nuit, quand l’enfant dort, quand ses rêves s’en vont,
Certes, ils vont plus loin et plus haut que les nôtres.
Je crois aux enfants comme on croyait aux apôtres ;
Et quand je vois ces chers petits êtres sans fiel
Et sans peur, désirer quelque chose du ciel,
Je le leur donnerais, si je l’avais. La sphère
Que l’enfant veut, doit être à lui, s’il la préfère.
D’ailleurs, n’avez-vous rien au delà de vos droits ?
Oh ! je voudrais bien voir, par exemple, les rois
S’étonner que des nains puissent avoir un monde !
Oui, je vous donnerais, anges à tête blonde,
Si je pouvais, à vous qui régnez par l’amour,
Ces univers baignés d’un mystérieux jour,
Conduits par des esprits que l’ombre a pour ministres,
Et l’énorme rondeur des planètes sinistres.
Pourquoi pas ? Je me fie à vous, car je vous vois,
Et jamais vous n’avez fait de mal. Oui, parfois,
En songeant à quel point c’est grand, l’âme innocente,
Quand ma pensée au fond de l’infini s’absente,
Je me dis, dans l’extase et dans l’effroi sacré,
Que peut-être, là-haut, il est, dans l’Ignoré,
Un dieu supérieur aux dieux que nous rêvâmes,
Capable de donner des astres à des âmes.