Page:Hugo - Légende des siècles, Hachette, 1920, 1e série, volume 1.djvu/382

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Mais les pointes d’épée, âpres, inexorables, Comme des becs de flamme, accouraient derrière eux ; Les bras levés, les cris, les pleurs, étaient affreux ; On n’avait jamais vu peut-être une contrée D’un tel rayonnement de meurtre pénétrée ; Le pont, d’un bout à l’autre, était un cliquetis ; Les soldats arrachaient aux mères leurs petits ; Et l’on voyait tomber morts et vivants dans l’Èbre, Pêle-mêle, et pour tous, hélas ! ce pont funèbre Qui sortait de la ville, entrait dans le tombeau.


VI

Le couchant empourpra le mont Tibidabo ; Le soir vint ; tirant l’âne obstiné qui recule, Le soldat se remit en route au crépuscule, Heure trouble assortie au cri du chat-huant ; Lourds de butin, le long des chemins saluant Les images des saints que les passants vénèrent, Vainqueurs, sanglants, joyeux, les rois s’en retournèrent Chacun avec ses gens, chacun vers son état ; Et, reflet du couchant, ou bien de l’attentat, La chaîne des vieux monts, funeste et vaste bouge,