Page:Hugo - Légende des siècles, Hachette, 1920, 1e série, volume 1.djvu/516

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L’un des hommes paraît trente ans ; l’autre est encor Plus jeune, et, sur son dos, il porte en bandoulière La guitare où s’enlace une branche de lierre ; Il est grand et blond ; l’autre est petit, pâle et brun ; Ces hommes, qu’on dirait faits d’ombre et de parfum, Sont beaux, mais le démon dans leur beauté grimace ; Avril a de ces fleurs où rampe une limace.

« Mon grand Joss, mon petit Zéno, venez ici. Voyez. C’est effrayant. »

Celle qui parle ainsi C’est madame Mahaud ; le clair de lune semble Caresser sa beauté qui rayonne et qui tremble, Comme si ce doux être était de ceux que l’air Crée, apporte et remporte en un céleste éclair.

« Passer ici la nuit ! Certe, un trône s’achète ! Si vous n’étiez venus m’escorter en cachette, Dit-elle, je serais vraiment morte de peur. »

La lune éclaire auprès du seuil, dans la vapeur, Un des grands chevaliers adossés aux murailles.

« Comme je vous vendrais à l’encan ces ferrailles ! Dit Zéno ; je ferais, si j’étais le marquis, De ce tas de vieux cloux sortir des vins exquis, Des galas, des tournois, des bouffons et des femmes. »

Et, frappant cet airain d’où sort le bruit des âmes,