Page:Hugo - La Fin de Satan, 1886.djvu/121

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Il tenait compte en tout des faits accidentels.
Dans le champ du supplice il disait des mots tels
Que nul n’osait toucher à la première pierre ;
Il haïssait la haine, il combattait la guerre ;
Il disait : sois mon frère ! à l’esclave qu’on vend ;
Et, tranquille, il passait comme un pardon vivant ;
Il blanchissait le siècle autour de lui, de sorte
Que les justes, dont l’âme encor n’était pas morte,
Dans ces temps sans pitié, sans pudeur, sans amour,
Voyaient en s’éveillant luire deux points du jour,
L’aurore dans le ciel et sur terre cet homme.
Cet être était trop pur pour être vu par Rome.
Pourtant parmi les juifs, dans leur temple obscurci,
Chez leur roi lâche et triste, on en prenait souci ;
Et Caïphe y songeait dans sa chaire d’ivoire ;
Et, sans savoir encor ce qu’il en devait croire,
Hérode était allé jusqu’à dire : — Il paraît
Qu’il existe un certain Jésus de Nazareth.

Quelques hommes, de ceux qui ne savent pas lire,
De pauvres pâtres, pris d’on ne sait quel délire
Et du ravissement de l’entendre parler,
Le suivaient, l’aimaient tant qu’il les faisait trembler,
Et le montraient au peuple en disant : — C’est le maître.