Page:Hugo - La Fin de Satan, 1886.djvu/134

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O Peuple, et c’est du sang que la terre a sué
Derrière Anathias, Saül et Josué ;
Jéhovah bénissait ces grands impitoyables ;
Sobres, purs, ils menaient au combat, dans les sables,
Dans la nuit, sans jamais songer au lendemain,
Des soldats qui buvaient dans le creux de leur main ;
Le Tabernacle a crû dans le sang ; Dieu consacre
Par un carnage Aser, Lévi par un massacre,
Et l’antique Lévite est saint pour ce seul trait
Qu’il marchait en tuant tous ceux qu’il rencontrait ;
Samson ne laissait pas d’un mur pierre sur pierre ;
Macchabée était plein d’une telle lumière
Que les peuples disaient : son armure est en or ;
Et Lysias, Seron, Gorgias, Nicanor,
Fuyaient devant cet homme aux cris de guerre étranges,
Que suivaient, à cheval sur les vents, cinq archanges !
Ces héros ont toujours Jéhovah pour effort ;
Leur fer ouvre un sillon ; Peuple, ils font de la mort
Sortir la vie, et, grâce à leurs lances vermeilles,
Les gueules des lions sont des ruches d’abeilles.
Ayez autour de vous la peur, en vous l’effroi ;
C’est le dogme. David fut un sublime roi ;
Il se plaisait au rire, aux chants, aux grappes mûres,
Un jour il se pencha sur les choses obscures,
Et, pâle, il reconnut que le commencement
De la sagesse était un profond tremblement.
O Peuple, Sabaoth lugubrement médite
Sur la race d’Adam presque toujours maudite,