Page:Hugo - La Fin de Satan, 1886.djvu/33

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée



Car dans ces temps lointains, de ténèbres voilés,
Où la nature et l’homme étaient encore mêlés,
Les forfaits rayonnaient dans l’espace, en désastres,
Et les vices allaient éteindre au ciel les astres.
Le mal sortait de l’homme et montait jusqu’à Dieu.
Le char du crime avait du sang jusqu’à l’essieu ;
Le meurtre, l’attentat, les luxures livides
Riaient, buvaient, chantaient, régnaient ; les fils avides
Soufflaient sur les parents comme sur un flambeau ;
Ce que la mort assise au seuil noir du tombeau
Voyait d’horreurs, faisait parler cette muette.
La nuit du cœur humain effrayait la chouette ;
L’ignorance indignait l’âne ; les guet-apens,
Les dols, les trahisons faisaient honte aux serpents ;
Si bien que l’homme ayant rempli son âme immonde
D’abîmes, Dieu put dire au gouffre : Emplis le monde.

L’urne du gouffre alors se pencha. Le jour fuit ;
Et tout ce qui vivait et marchait devint nuit.
Eve joignit les mains dans sa tombe profonde.


II

Tout avait disparu. L’onde montait sur l’onde.
Dieu lisait dans son livre et tout était détruit.
Dans le ciel par moments on entendait le bruit