Page:Hugo - La Légende des siècles, 1e série, édition Hetzel, 1859, tome 1.djvu/232

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
206
LA LÉGENDE DES SIÈCLES.

Qui nous donne cela par-dessus le marché.
— Quel est son nom ? — Pour nous Satan, pour vous Péché ;
Dit Zéno, caressant jusqu’en sa raillerie.
— Ne riez pas ainsi, je ne veux pas qu’on rie.
Paix, Zéno ! Parle-moi, toi, Joss, mon chambellan.
— Madame, Viridis, comtesse de Milan,
Fut superbe ; Diane éblouissait le pâtre ;
Aspasie, Isabeau de Saxe, Cléopâtre,
Sont des noms devant qui la louange se tait ;
Rhodope fut divine ; Érylésis était
Si belle, que Vénus, jalouse de sa gorge,
La traîna toute nue en la céleste forge
Et la fit sur l’enclume écraser par Vulcain ;
Eh bien, autant l’étoile éclipse le sequin,
Autant le temple éclipse un monceau de décombres,
Autant vous effacez toutes ces belles ombres !
Ces coquettes qui font des mines dans l’azur.
Les elfes, les péris, ont le front jeune et pur
Moins que vous, et pourtant le vent et ses bouffées
Les ont galamment d’ombre et de rayons coiffées.
— Flatteur, tu chantes bien, » dit Mahaud. Joss reprend :
« Si j’étais, sous le ciel splendide et transparent,
Ange, fille ou démon, s’il fallait que j’apprisse
La grâce, la gaîté, le rire et le caprice,
Altesse, je viendrais à l’école chez vous.
Vous êtes une fée aux yeux divins et doux,
Ayant pour un vil sceptre échangé sa baguette. »
Mahaud songe : « On dirait que ton regard me guette,