Page:Hugo - La Légende des siècles, 2e série, édition Hetzel, 1877, tome 2.djvu/285

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Respectez le cercueil sans mépriser la bière ;
Faites le même accueil à la même poussière,
Sur le même silence ayez le même chant.
Quoi ! je cherche un apôtre et je trouve un marchand !
C'est d'un comptoir que part l'escalier de la chaire.
Que diraient-ils de voir leurs psaumes à l'enchère,
Ces hommes qui songeaient, pâles, dans le désert ?
Ah ! ce De Profundis superfin qui ne sert
Qu'aux riches, et qu'on met en musique, et qu'on brode,
Que Jésus n'aurait pas et qu'obtiendrait Hérode,
Ô terreur ! il n'en faut pas tant pour faire Dieu
Farouche, et pour changer en ciel noir le ciel bleu !
La prière vendue a l'accent du blasphème.
Hélas ! c'est de la nuit que dans les cœurs on sème.
L'ombre, au-dessus de vous, mages qui brocantez,
Efface brusquement toutes les vérités.
Quoi ! vous ne voyez pas l'éclipse formidable !
Vous qui savez combien l'abîme est insondable,
Vous vous faites vendeurs !

                                         Prêtres, l'adossement
De l'échoppe suffit pour que le firmament
Épaississe au-dessus de l'église ses voiles ;
La boutique retire au temple les étoiles.