Page:Hugo - La Légende des siècles, 2e série, édition Hetzel, 1877, tome 2.djvu/334

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En été, quand l'azur rayonne, ô pur jardin !
Paul étant presque un ange, il fut presque un éden ;
Et l'enfant fut aimé dans cette solitude,
Hélas ! et c'est ainsi qu'il en prit l'habitude.

Un jardin, c'est fort beau, n'est-ce pas ? Mettez-y
Un marmot ; ajoutez un vieillard ; c'est ainsi
Que Dieu fait. Combinant ce que le cœur souhaite
Avec ce que les yeux désirent, ce poëte
Complète, car au fond la nature c'est l'art,
Les roses par l'enfant, l'enfant par le vieillard.
L'enfant voisine avec les fleurs, c'est de son âge ;
Et l'aïeul vient, sachant qu'il est du voisinage ;
Et comme c'est exquis de rire au mois d'avril !
Un nouveau-né vermeil, et nu jusqu'au nombril,
Couché sur l'herbe en fleurs, c'est aimable, ô Virgile !
Hélas ! c'est tellement divin que c'est fragile !
Paul est d'abord bien frêle et bien chétif. Qui sait ?
Vivra-t-il ? Un vent noir, lorsqu'il naquit, passait,
Souffle traître ; et sait-on si cette bise amère
Ne viendra pas chercher l'enfant après la mère ?
Il faut allaiter Paul ; une chèvre y consent.
Paul est frère de lait du chevreau bondissant ;
Puisque le chevreau saute, il sied que l'homme marche,
Et l'enfant veut marcher. Et l'aïeul patriarche
Dit : C'est juste. Marchons. Oh ! les enfants, cela
Tremble, un meuble est Charybde, une pierre est Scylla,