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XIV

À GRANVILLE, EN 1836

Voici juin. Le moineau raille
Dans les champs les amoureux ;
Le rossignol de muraille
Chante dans son nid pierreux.

Les herbes et les branchages,
Pleins de soupirs et d’abois,
Font de charmants rabâchages
Dans la profondeur des bois.

La grive et la tourterelle
Prolongent, dans les nids sourds,
La ravissante querelle
Des baisers et des amours.

Sous les treilles de la plaine,
Dans l’antre où verdit l’osier,
Virgile enivre Silène,
Et Rabelais Grandgousier.

Ô Virgile, verse à boire !
Verse à boire, ô Rabelais !
La forêt est une gloire ;
La caverne est un palais !

Il n’est pas de lac ni d’île
Qui ne nous prenne au gluau,
Qui n’improvise une idylle,
Ou qui ne chante un duo.