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L'ATOME FRATERNISE AVEC L'OURAGAN.

Moskowa sept ou huit coups de lance n’importe où, à Lutzen un éclat d’obus qui m’a écrasé un doigt… — Ah ! et puis à Waterloo un biscaïen dans la cuisse. Voilà tout.

— Comme c’est beau, s’écria le perruquier avec un accent pindarique, de mourir sur le champ de bataille ! Moi ! parole d’honneur, plutôt que de crever sur le grabat, de maladie, lentement, un peu tous les jours, avec les drogues, les cataplasmes, la seringue et la médecine, j’aimerais mieux recevoir dans le ventre un boulet de canon !

— Vous n’êtes pas dégoûté, fit le soldat.

Il achevait à peine qu’un effroyable fracas ébranla la boutique. Une vitre de la devanture venait de s’étoiler brusquement.

— Ah Dieu ! cria-t-il, c’en est un !

— Quoi ?

— Un boulet de canon.

— Le voici, dit le soldat.

Et il ramassa quelque chose qui roulait à terre. C’était un caillou.

Le perruquier courut à la vitre brisée et vit Gavroche qui s’enfuyait à toutes jambes vers le marché Saint-Jean. En passant devant la boutique du perruquier, Gavroche, qui avait les deux mômes sur le cœur, n’avait pu résister au désir de lui dire bonjour, et lui avait jeté une pierre dans ses carreaux.

— Voyez-vous ! hurla le perruquier qui de blanc était devenu bleu, cela fait le mal pour le mal. Qu’est-ce qu’on lui a fait à ce gamin-là ?