Page:Hugo Rhin Hetzel tome 1.djvu/129

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Ainsi l’hôtel de ville de Cologne, qui a probablement quelque cave romaine dans ses fondations, n’était vers 1250 qu’un grave et sévère logis à ogives comme notre Maison-aux-Piliers ; puis on a compris qu’il fallait un beffroi pour les tocsins, pour les prises d’armes, pour les veilleurs de nuit, et le quatorzième siècle a édifié une belle tour, bourgeoise et féodale tout à la fois ; puis, sous Maximilien, le souffle joyeux de la renaissance commençant à agiter les sombres feuillages de pierre des cathédrales, un goût d’élégance et d’ornement se répandant partout, les échevins de Cologne ont senti le besoin de faire la toilette de leur maison de ville ; ils ont appelé l’Italie quelque architecte élève du vieux Michel-Ange, ou de France quelque sculpteur ami du jeune Jean Goujon, et ils ont ajusté sur leur noire façade du treizième siècle un porche triomphant et magnifique. Quelques années plus tard, il leur a fallu un promenoir à côté de leur greffe, et ils se sont bâti une charmante arrière-cour à galeries sous arcades, somptueusement égayée de blasons et de bas-reliefs, que j’ai vue, et que dans deux ou trois ans personne ne verra, car on la laisse tomber en ruine. Enfin, sous Charles-Quint, ils ont reconnu qu’une grande salle leur était nécessaire pour les encans, pour les criées, pour les assemblées de bourgeois, et ils ont érigé vis-à-vis de leur beffroi et de leur porche un riche corps de logis en brique et en pierre du plus beau goût et de la plus noble ordonnance. — Aujourd’hui, nef du treizième siècle, beffroi du quatorzième, porche et arrière-cour de Maximilien, halle de Charles-Quint, vieillis ensemble par le temps, chargés de traditions et de souvenirs par les événements, soudés et groupés par le hasard de la façon la plus originale et la plus pittoresque, forment l’hôtel de ville de Cologne.

Soit dit en passant, mon ami, et comme produit de l’art, et comme expression de l’histoire, ceci vaut un peu mieux que cette froide et blafarde bâtisse, bâtarde par sa triple devanture encombrée d’archivoltes, bâtarde par l’économique et mesquine monotonie de son ornementation où tout se répète et où rien n’étincelle, bâtarde par ses toits tronqués sans crêtes et sans cheminées, dans laquelle des