Page:Hugo Rhin Hetzel tome 1.djvu/137

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de 1688, en expulsant Jacques II, ne font autre chose que rendre possible cette étrange bataille d’Almanza, où l’on vit face à face sur le même terrain l’armée française commandée par un anglais, le maréchal de Berwick, et l’armée anglaise commandée par un français, Ruvigny, lord Galloway. Si Louis XIII n’était pas mort le 14 mai 1643, l’idée ne serait pas venue au vieux comte de Fontana d’attaquer Rocroy dans les cinq jours ; et un héroïque prince de vingt-deux ans n’aurait pas eu cette magnifique occasion du 19 mai, qui a fait du duc d’Enghien le grand Condé. Et au milieu de tout ce tumulte de faits qui encombrent les chronologies, que d’échos singuliers, que de parallélismes extraordinaires, que de contre-coups formidables ! En 1664, après l’offense faite au duc de Créqui, son ambassadeur, Louis XIV fait bannir les corses de Rome ; cent quarante ans plus tard, Napoléon Buonaparte exile de France les Bourbons.

Que d’ombre ! et que d’éclairs dans cette ombre ! Vers 1612, lorsque le jeune Henri de Montmorency, alors âgé de dix-sept ans, voyait aller et venir chez son père, parmi les gentilshommes-domestiques, apportant l’aiguière et donnant à laver, dans l’humble attitude du service, un pâle et chétif page, le petit de Laubespine de Châteauneuf, qui lui eût dit que ce page, si respectueusement incliné devant lui, deviendrait sous-diacre, que ce sous-diacre deviendrait garde des sceaux, que ce garde des sceaux présiderait par commission le parlement de Toulouse, et que, vingt ans plus tard, ce page-sous-diacre-président demanderait sournoisement des dispenses au pape afin de pouvoir le faire décapiter, lui, le maître de ce drôle, lui Henri II, duc de Montmorency, maréchal de France par le choix de l’épée, pair du royaume par la grâce de Dieu ! Quand le président de Thou, dans son livre, fourbissait, aiguisait et remettait si soigneusement à neuf l’édit de Louis XI du 22 décembre 1477, qui eût dit à ce père qu’un jour ce même édit, avec Laubardemont pour manche, serait la hache dont Richelieu trancherait la tête de son fils !

Et au milieu de ce chaos il y a des lois. Le chaos n’est que l’apparence, l’ordre est au fond. Après de longs inter-