Page:Hugo Rhin Hetzel tome 1.djvu/181

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sant face au Rhin. — Trois cheminées, dont une à colonnettes, pendent arrachées à diverses hauteurs. Trois étages défoncés sous mes pieds. Au fond, deux arches voûtées. À l’une, des branches mortes : à l’autre, deux jolis rameaux de lierre qui se balancent gracieusement. J’y vais. Voûtes construites sur le basalte même du mont, qui reparaît à vif. Traces de fumée. Dans l’autre grand compartiment où je suis entré tout d’abord, et qui a dû être la cour, près de la tour ronde, plâtrage blanc sur le mur avec un reste de peinture et ces deux chiffres tracés en rouge : 23 — 18 — (sic) . Je fais le tour extérieur du château par le fossé. — Escalade assez pénible. — L’herbe glisse. — Il faut ramper de broussaille en broussaille au-dessus d’un précipice assez profond. Toujours pas d’entrée ni de trace de porte murée au bas de la grande tour. Reste de peintures sur les mâchicoulis. Le vent tourne les feuillets de mon livre et me gêne pour écrire. — Je vais rentrer dans la ruine. J’y suis. — J’écris sur une petite console de velours vert que me prête le vieux mur. »

J’ai oublié de vous dire que cette énorme ruine s’appelle la souris (die Maüse). Voici pourquoi :

Au douzième siècle, il n’y avait là qu’un petit burg toujours guetté et fort souvent molesté par un gros château fort situé une demi-lieue plus loin, qu’on appelait le Chat (die Katz), par abréviation du nom de son seigneur, Katzenellenbogen. Kuno de Falkenstein, à qui le chétif burg de Velmich échut en héritage, le fit raser et construisit à la même place un château beaucoup plus grand que le château voisin en déclarant que désormais ce serait la Souris qui mangerait le Chat.

Il avait raison. Die Maüse en effet, quoique tombée aujourd’hui, est encore une sinistre et redoutable commère sortie jadis armée et vivante, avec ses hanches de lave et de basalte, des entrailles mêmes de ce volcan éteint, qui la porte, ce semble, avec orgueil. Je ne pense pas que personne ait jamais été tenté de railler cette montagne qui a enfanté cette souris.

Je suis resté dans la masure jusqu’au coucher du so-