Page:Hugo Rhin Hetzel tome 2.djvu/24

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du monde primitif. Les algonquins traduisent ce mot si court, si simple et si doux, France, par Mittigouchlouekendalakiank.

Aussi, quand la baraque s’ouvrit, la foule, impatiente de contempler les merveilles promises, s’y précipita. Les mittigouchiouekendalakiank des charlatans se résolvent toujours en une pluie de liards ou de doublons dans leur escarcelle, selon qu’ils se sont adressés au peuple d’en bas ou au peuple d’en haut.

Une heure après nous avions repris notre promenade et nous suivions la lisière d’un petit bois. G― ne m’avait pas encore adressé une parole. Je faisais mille efforts inutiles pour rentrer en grâce. Tout à coup, paraissant sortir d’une profonde rêverie et comme se répondant à lui-même, il dit : — Et il en parle fort bien !

— De la gale, n’est-ce pas ? fis-je fort timidement.

— Oui, pardieu, de la gale, me répondit G― avec fermeté.

Il ajouta après un silence :

— Cet homme a fait de magnifiques observations microscopiques. De vraies découvertes.

Je hasardai encore un mot :

— Il aura étudié son sujet sur ce pharaon d’Égypte dont il a fait son laquais et son musicien.

Mais G― ne m’entendait déjà plus.

— Quelle prodigieuse chose ! s’écria-t-il, et quel sujet de méditation mélancolique ! La maladie suit l’homme après la mort. Les squelettes ont la gale !

Il y eut encore un silence, puis il reprit :

— Cet homme manque à la troisième classe de l’Institut. Il y a bien des académiciens qui sont charlatans ; voilà un charlatan qui devrait être académicien.

Maintenant, mon ami, je vous vois d’ici rire à votre tour et vous écrier : — Est-ce tout ? oh ! les aimables aventures, les engageantes histoires, et quel voyageur à pied vous êtes ! Rencontrer des ours, ou entendre un avaleur de sabres, bras nus et ceinturonné de rouge, confronter en plein air l’acarus de l’homme à l’acarus du chameau et faire à des paysans un cours philosophique de gale comparée ! Mais, en vérité, il faut en grande hâte se jeter en bas