de volcans éteints qui commence au Taunus et finit aux Sept-Monts. Depuis lors, le lac s’est changé en plaine, les hommes ont succédé aux flots et les donjons aux écueils.
Je viens de vous dire quelques-uns des grands fantômes historiques qui ont traversé cette plaine depuis vingt siècles. César a été le premier, Bonaparte le dernier.
Il y a des villes sur lesquelles, à de certaines époques presque périodiques, par une sorte de fatalité locale qui est dans l’air ambiant, par la combinaison de leur situation géographique avec leur valeur politique, il se forme des nœuds d’événements comme il se forme des nœuds de nuages sur les hautes montagnes.
Heidelberg est une de ces villes.
Pour ne vous parler que de son château (car il faut bien que je vienne à vous en entretenir, et j’aurais dû commencer par là), que d’aventures n’a-t-il pas eues ! Pendant cinq cents ans il a reçu le contre-coup de tout ce qui a ébranlé l’Europe, et il a fini par en crouler. Cela tient, il est vrai, à ce que le château de Heidelberg, résidence du comte palatin, lequel n’avait au-dessus de lui que les rois, les empereurs et les papes, et, trop grand pour rester courbé sous leurs pieds, ne pouvait relever la tête qu’en les heurtant, cela tient, dis-je, à ce que le château de Heidelberg a toujours eu je ne sais quelle attitude d’opposition aux puissances. Dès 1300, époque de sa fondation, il commence par une Thébaïde ; il a dans le palatin Rodolphe et l’empereur Louis, ces deux frères dénaturés, son Etéocle et son Polynice. Puis l’électeur va grandissant. En 1400, le palatin Rupert II, assisté des trois électeurs du Rhin, dépose l’empereur Wenceslas et prend sa place ; cent vingt ans plus tard, en 1519, le palatin Frédéric II fera du jeune roi Charles Ier d’Espagne l’empereur Charles-Quint. En 1415, le comte Louis Le Barbu se déclare protecteur du concile de Constance, et emprisonne dans son château de Heidelberg un pape, Jean XXIII, qu’il appelle, dans une lettre à l’empereur, votre simoniaque Balthazar Kossa. Un siècle après, Luther se réfugie à Nauenheim, près de ce même Heidelberg, à l’ombre du palatin Frédéric. J’omets ici à dessein, pour vous en parler plus au long dans un instant, Frédéric-le-Victorieux, le